Je viens d’égorger un coq.
J’ai prié d’abord, à côté de lui.
En amont, dissimulé mon poignard sous le vêtement.
Le sang a giclé…
La tête tranchée tombée à terre.
« Réactions galvaniques post-mortem » à la X-Files.
Les yeux du coq…. Ses paupières mobiles. La langue dehors.
Renversé son cou dans le sceau. Recueillir le sang.
J’avais préalablement creusé au pied d’un arbre. La vie y a été versée. J’ai ensuite recouvert le trou afin que personne ne puisse y toucher (je n’ai aucune grande confiance en ce chaman, ils sont férus de sorcellerie).
Les tapettes étaient en train de dormir. Ils veulent manger de la viande sans voir la mort. Sans l’observer ni l’approcher. Seulement déguster.
Et lorsque je me suis coupée (va savoir comment, c’est indolore, une entaille de 6 centimètres de long et de 3 centimètres de profondeur dans le creux latéral de l’avant-bras bras, la plus impressive de ma vie) l’allemand a perdu son sang-froid… l’autre a voulu jouer les samaritains pour prendre le dessus, mais il a été gentil, avec son eau oxygénée et des compresses stériles (j’ai oublié une partie de mon matos — et je regrette trop, dans ces moments-là, le nécessaire pour suturer. Il faudrait au moins 4 points). Anyway, j’ai procédé comme avec les morsures : grâce à des bandes strip. Réunir les berges. Terminer avec un bandage.
Je pensais trop à toi, ma perle, ma petite soeur, ma chirurgienne de Neuchâtel. Si tu avais été là, je t’aurais tendu mon bras, et j’aurais fermé les yeux.
Et tu m’aurais tuée… 😂
Je serais morte d’une septicémie, ahahaha.
Tellement de poussières et de moustiques ici. Tu verrais mes bras… mes jambes… mes pieds. Faudrait que je pense à les photographier.
Les sous-hommes se photographient chaque jour, matin, midi, soir. Je passe mon temps à mes couper les ongles.
J’ai dû relaver mes vêtements qui étaient de haut en bas tachés (je suis trop bête d’avoir tenu le coq à la verticale au départ…mais je voulais sa morte droite et digne. Ne pas le coucher au sol. Ne pas le soumettre).
Le coq s’est montré infiniment digne.
Ps : Je viens de m’enfiler 7 mangues jaunes, mûres à point. Après la soupe au coq. J’ai failli ne pas la manger d’ailleurs puisque j’essaie d’être végétarienne en temps normal et parce que le chaman (l’imam avec les plumes sur la tête…je m’en remettrai jamais 😆) a récité un mantra après le sacrifice par mes soins. Et je sais que ses croyances sont panthéistes. Quand tu dis : thank you God for everything and thank you the plants; y a quelque chose qui cloche. Tu ne peux pas enchaîner dans la même phrase ces deux entités. Tu ne peux pas les placer au même niveau. “Thank you God, thank you the trees, thank you the sun… thank you my friends”.
Bref, j’ai hésité mais comme j’avais faim et que je suis un lâche. Ça fait quasi deux mois que je ne consomme ni sucre, ni sel, ni graisse, ni lait. De l’avoine et des bananes bouillies, sinon du riz surcuit. Ce coq, le sel et le gingembre ont marqué la rupture de la diète.
Et même pendant un moment aussi important, même là, les gars continuaient de parler et de me casser les oreilles. Incapables de recueillement.
Plus d’une fois j’ai voulu leur balancer : une retraite c’est aussi savoir fermer sa gueule en fait.
Ce coq je l’ai sur l’estomac.
Je l’ai tué pour l’équipe. En Son Nom et parce que c’est dans le fond notre droit. Mais je l’aurai toujours sur la conscience.