« L’enseignement supérieur allemand, dans son ensemble, a perdu ce qui est l’essentiel : un but, mais également le moyen de parvenir à ce but. Que l’éducation, que la culture générale soit une fin en soi, et qu’à cette fin, un éducateur soit nécessaire (et pas le professeur de lycée ou l’érudit universitaire), voilà ce qu’on a oublié… Ce qui manque, ce sont des enseignants eux-même éduqués, des esprits supérieurs et distingués, qui fassent leurs preuves en toutes circonstances, par leur parole et par leur silence, qui soient de vraies cultures vivantes, incarnées, mûries et délectables — et non pas les rustres “savants” que les établissements offrent à la jeunesse en guise de nourrices.
Apprendre à penser : dans nos écoles, on a plus la moindre idée de ce que c’est. Même au sein des universités, et jusque parmi les plus savants des philosophes, la logique commence à dépérir en tant que théorie, en tant que pratique, en tant que technique. Il faut un programme, une rigueur, une volonté de maîtrise, apprendre à penser comme on apprend à danser, une sorte particulière de danse…»
Friedrich Nietzsche. Crépuscule des idoles, Paris, Gallimard, 1974, p. 54, 56.