Philippe Ballard et consorts aimeraient voir les jeunes voilées baisser le regard, détourner les yeux, se faire toutes petites, s’effacer humblement sous l’ombre de leur très légitime autorité.
Éclairé, Monsieur l’affirme sans gêne : il tolère un voile de soumission, un voile « d’apaisement » je cite; celui muet d’une grand-mère ouvrière « femme de ménage » essoufflée par la vie dure et les humiliations.
Fils des Lumières, Monsieur préfère le hijâb analphabète et post-colonial qui baisse bien la tête, courbe l’échine et murmure « amen » aux injonctions patriarcales d’une société sexiste dictant à son sujet mineur la marche de sa conduite.
Démocrate, Monsieur tient à éradiquer du paysage urbain toute marque d’identité différente; d’audace religieuse; de fierté rituelle; de subjectivité simple.
Les éducateurs de la nation exige que ces désobéissantes portent leurs vêtements seulement en privé (au sein de la salle à manger ou en cuisine ?) les obligeant – de force – à taire, à traquer, toute présence divine débordant des murs.
La férocité « libérale » veut contrôler et punir le corps de ces indisciplinées asservies au symbole du mal; arbitrairement réduites à ce tissu millénaire dont la charge sémantique est constamment pervertie ou hypertrophiée ou abêtie.
Dans le fond, la bonne foi civile et si respectable des ces hommes, chantre du souci humaniste, se donne pour mission d’apprendre à ces pauvres frondeuses la vraie modestie, une pudeur vraie et d’authentiques règles de savoir-vivre : en fait, il pourrait leur venir en aide.
De mon côté, je rêve d’offrir – en mains propres – un foulard à chacune de ces dames, en guise de misérable réparation pour la haine, le racisme, l’arrogance extrême, la stupidité et les innombrables procès d’intention ainsi que le florilège très habituel et normal d’insultes que ces croyantes essuient au quotidien.